Ouvrir l’imagination.

…que parmi les figurines d’animaux en plastique qui accompagnaient les miniatures, celles de Corgi Toys avaient ma préférence. J’aimais  tout particulièrement le Saint-Bernard qui accompagnait la Citroën ID19 Alpine Rescue.

Il avait quelque chose de rassurant. Il me semblait qu’avec un tel compagnon rien de facheux ne pouvait arriver.

Cette miniature et son environment, personnages et illustrations, étaient faits pour ouvrir l’imagination des petits clients. Le dessin avec le petit avion abimé dans la neige qui figurait au dos de la boîte de la Citroën ID19 alpine rescue, était un point de départ formidable pour imaginer des aventures.

Les collectionneurs adultes qui se sont appropriés ces objets les ont détournés de leur but premier. Mais pour celui qui a gardé quelques souvenirs et son âme d’enfant, la magie peut encore fonctionner.

Dans l’exemplaire en vente cette semaine, le modèle et la boîte sont en état parfait, les personnages encore dans leur bulle d’origine. Et cela interroge. Comment se fait-il qu’un objet aussi ludique n’ait pas servi ?

Il s’agit sûrement d’un invendu de magasin. Les amateurs collectionneurs de l’époque ont rarement acheté ce type de produit qui est clairement un jouet et non une maquette. Ces derniers ont sûrement préféré acquérir la Citroën Break ID19, un modèle de chez C-I-J, Dinky Toys ou Norev. Une déclinaison classique, sans marquage.

La firme de Swansea s’est clairement et rapidement positionnée sur le créneau ludique. Elle a ainsi pu capter une clientèle plus jeune que celle de Dinky Toys. Les figurines d’animaux ont rapidement accompagné les modèles. Elles sont apparues avec la série dédiée au cirque Chipperfields et celle dédiée au monde agricole.

Ces figurines peuvent constituer un fil conducteur, un thème pour les collectionneurs de Corgi Toys. Le taureau de la Lamborghini, le rhinoceros de la Volkswagen Safari, les dauphins du Berliet semi-remorque aquarium ou le kangourou de la Hillman Hunter sont quelques exemples des produits sortis de l’imagination débordante du bureau d’étude anglais.

Cette semaine nous avons aussi un beau tracteur Berliet semi-remorque van avec des chevaux. Corgi Toys n’a pas dû regretter la conception de cette remorque qui a résisté au temps et connu de nombreuses déclinaisons.

Celle avec le tracteur Berliet n’est pas la plus fréquente. Dans l’exemplaire en vente les chevaux sont également dans leur bulle plastique. Cette remorque a d’abord été consacrée au transport des chevaux de cirque avant d’être utilisée pour les chevaux de course.

La Land Rover Daktari est un autre exemple de l’esprit Corgi Toys. La firme de Swansea a réussi à faire cohabiter un tigre, un lion et un chimpanzé. C’est une fort intéressante version intermédiaire qui est proposée cette semaine, se situant entre la première, équipée de jantes en acier et la dernière avec roues en plastique. Elle possède des jantes moulées en zamac qui sont souvent chez Corgi Toys synonymes de variantes peu fréquentes.

Autre série télévisée au programme, le Chevrolet fourgon de « Charlie’s Angels ». Pas d’animaux, mais une belle boîte avec la photo des trois héroïnes au dos de cette dernière qui participe au plaisir de l’acquisition. Dans le cas présent, c’est la photo des trois héroïnes, qui doit ouvrir l’imagination. Gageons que cette photo a elle aussi alimenté  les rêveries des jeunes acheteurs. Savourons ce produit en avance sur son temps, car en 1978, elles étaient peu nombreuses les séries où les femmes menaient l’action.

Un autre Corgi Toys au menu cette semaine, et qui a dû aussi faire son effet chez les jeunes acheteurs : le coffret « SOS » .  Pour un fabricant de jouets, la présence d’un hélicoptère dans un coffret est synonyme d’un succès garanti. Cet engin a toujours produit de l’effet.  Il a permis à Corgi Toys de liquider quelques Ford Granada et Range Rover, également présentes dans ce coffret. Ce produit datant du milieu des années soixante-dix est peu fréquent. La encore, du fait de sa fonction ludique assumée, il a été boudé à sa sortie.

C’est le premier que j’ai à vendre en quarante ans d’activité.

La présence d’une boîte coffret en parfait état est indispensable au plaisir de l’acquisition.

C’est l’aspect ludique des jouets à transformation qui a motivé M. Ferdinand De Vazeilles lorsqu’il a lancé sa gamme de miniatures Solido.

La qualité de fabrication faisait aussi partie de l’ADN de sa marque. Ces deux concepts serviront de fil rouge durant la présence de la famille de Vazeilles à la tête de l’entreprise, jusqu’au milieu des années soixante-dix. Démonter, assembler, transformer voilà des mots qui accompagneront les séries Major, Junior, Baby, Mosquito.

Nous avons cette semaine quelques beaux exemplaires des dernières Junior.

Elles datent de l’arrivée de ses enfants, Jean et ses deux soeurs, à la tête de l’entreprise au milieu des années cinquante. Ces derniers avaient pris conscience qu’il fallait désormais reproduire le plus fidèlement possible les autos afin que les enfants les identifient facilement. Cela va conduire à fabriquer des autos dotées de carrosserie monobloc.

La liberté donnée aux enfants de créer des véhicules à l’aide de deux ou trois capots et carrosseries différentes va disparaître, et avec elle, une certaine conception du jouet.

Au milieu des années cinquante ce sont les autos américaines qui font rêver.

La direction de Solido a donc puisé une partie de son inspiration de l’autre côté de l’Atlantique. Nous avons une Studebaker Commander et une Mercury cabriolet

Solido a peu utilisé l’astuce que nombre de ses concurrents ont parfois usé jusqu’à la corde et qui consiste à créer des coffrets pour écouler une partie de la production.

Un prix attrayant, au vu du nombre de modèles servait cette cause. On poussant plus loin, on peut voir dans cette pratique le signe d’une santé précaire de la part du fabricant.

Quand la famille de Vazeilles quitta l’entreprise, les repreneurs ne se privèrent guère de cette pratique, au risque de lasser les collectionneurs, dans les années 1990-2000. Je parle en connaissance de cause. Nous avons arrêté d’acheter les nouveaux produits Solido en 1990.

Les deux coffrets proposés cette semaine marquent une époque charnière.

Jean de Vazeilles a expliqué qu’il avait laissé aux repreneurs au milieu des années soixante-dix, un « catalogue » et de nombreux projets.

Ces deux coffrets font partie de cet héritage. Ils semblent d’ailleurs être inspirés de ceux vus dans la série 100/200 (trois coffrets).

J’apprécie celui situant l’action à la montagne en hiver. J’y vois un clin d’oeil aussi à Corgi Toys.

Plusieurs détails peuvent être prétexte à leur acquisition. Le décor de la boîte invitant le spectateur à se plonger dans les joies des sports de glisse et les frimas de l’hiver, le personnage chaussé de ses skis de fond, la galerie avec ses skis qui équipe la Lancia Beta et bien sûr, l’Unic Marmon chasse-neige qui ouvre la route.

L’autre coffret met en scène une Peugeot 504 break et un van à chevaux. On peut regretter que Solido n’ait pas décoré son coffret d’une scène animée comme savait si bien le faire Corgi Toys.

 Les produits sont de qualité, mais le cheval, seul, perdu dans sa grande boîte a un peu de mal à nous émouvoir. Il manque une présence humaine.

Les deux autres coffrets provenant de Liverpool au menu cette semaine sont bien plus évocateurs.

Certain diront que Liverpool grâce à la magie de son emballage a su gommer une partie des carences de ses modèles.

La présentation est dynamique, avec les trois modèles présentés de biais.

Mais c’est surtout le dessin dans l’angle supérieur qui conditionne le spectateur. C’est réussi.

Dans le « International GT » la représentation de la chicane du circuit a dû motiver plus d’un jeune acheteur.  Elle ressemble à celle du circuit de Goodwood.

Ces coffrets sont peu fréquents. Ils n’ont pas été distribués chez nous en France. Ils accréditent aussi la théorie suivante. Vous avez constaté qu’ils contiennent des couleurs tardives, moins fréquentes. Ils servaient donc à écouler une partie du trop plein de la fin de production.

Vincent Espinasse