A la croisée des chemins

…comment l’acquisition de la série des six camions Guy fourgon publicitaire de chez Dinky Toys fut un tournant dans notre collection. Nous étions en 1979 et c’est plus tard que je l’ai compris. Notre collection a commencé en 1975 avec l’étoile filante de chez C-I-J. Les voitures de course et de record ont été notre première thématique, en raison de notre intérêt pour le sport automobile de l’époque. Les Solido, les Crescent toys et les Dinky Toys constituaient la majorité de nos achats. Puis il y eut une première extension avec l’acquisition de miniatures se rapportant à l’univers de l’automobile : camion-citerne, dépanneuses, porte-autos, notamment le camion Commer de l’Ecurie Ecosse.

C’est ainsi que nous avons découvert les camions de chez Tekno et de chez Dinky Toys Grande Bretagne principalement. Dans ces gammes, les modèles portant des publicités de compagnies pétrolières étaient nombreux.

Le Leyland Octopus citerne Shell BP de chez Dinky Toys et le Saviem SM 300 Esso de chez Solido , proposés cette semaine sont de bons exemples des modèles que nous avions commencés à acquérir en marge des autos de course.

 

L’univers des fourgons publicitaires n’était plus si loin, et nous avons commencé avec ceux portant une publicité en rapport avec ces mêmes compagnies pétrolières. Par entrainement, nous avons vite cherché à constituer une série… Et qand mon père a aperçu un dimanche après-midi la série complète des six camions Guy dans la vitrine de M. Reboul antiquaire du marché Biron aux puces de Saint-Ouen, il est tombé sous le charme. Nous étions cependant incapables de mettre une valeur sur ces objets, alors que le prix demandé était conséquent. Nous avons poursuivi notre apprentissage. Charles Prieur, que nous rencontrions tous les dimanches chez Daniel Tufféry était d’une nature secrète et il ne nous dévoila qu’une partie des informations que nous attendions. Nous en avons  reparlé bien plus tard, quand nous sommes devenus amis.

Mon père trouva cependant assez d’éléments pour prendre sa décision. Il a toujours eu une démarche volontaire et l’idée d’avoir les six modèles d’un coup lui semblait un vrai plus. Nous les avons payés sun prix élevé. M. Reboul les avait achetés quelques temps auparavant chez Gilles Scherpereel auprès duquel il avait constitué une collection dédiée aux modèles publicitaires.

La qualité était là, ils étaient neufs en boîte, critère décisif pour mon père.

Nous étions partis dans une aventure hors norme. En 2025, j’ai toujours ces six camions. J’ai même eu la chance de récupérer un prototype qui avait appartenu à Jean-Michel Roulet, le « Lotus delta shoes ».

 

Cette semaine nous avons le « Golden Shred » qui est une des plus jolies publicités de la série. Ce n’est pas le plus facile à trouver, loin de là. Le modèle se situe plutôt à la fin de la production. En vitrine, ce camion attire les regards du fait de son harmonie de couleurs, rouge et de ses jantes jaune d’or. La publicité nous replonge dans le monde de l’enfance avec le « Golly » effigie de la marque Robertson, fabricant cette marmelade d’orange très populaire Outre-Manche.

Au milieu des années soixante-dix, le sport automobile est. Après une décennie passionnante, la première crise du pétrole de 1973 a des répercussions sur cette activité.

En 1977, l’entrée en lice dans le championnat du monde de formule 1 d’un fabricant d’automobiles généraliste, Renault, va bouleverser la donne. La mise au point du moteur turbo demande des moyens techniques et financiers que seul un grand constructeur pouvait avoir. Le fragile équilibre qui faisait coexister les grandes et les petites écuries de formule 1 est rompu à tout jamais.

Les meilleures écuries vont être approchées par les constructeurs généralistes qui vont leur fournir moteurs turbo et assistance.  Jusqu’ici, l’utilisation par une grande majorité des écuries de formule 1 du même moteur, le Ford Cosworth, permettait de maintenir en lice des d’écuries aux moyens limités, sans qu’elles soient ridicules en terme de performance.

On constatera le même phénomène en endurance, également l’apparition du moteur turbo et des budgets pour concourir de plus en plus conséquents. Les amateurs ou semi-amateurs vont petit à petit être exclus de la fête.

Au Mans, en 1978, j’ai assisté au sacre de la Renault Alpine A442B  (attention à bien placer le nom Alpine au second plan, Renault étant désormais à la barre).

Une équipe d’amateurs pouvait encore participer à l’épreuve. Je pense que c’est Alain Wibratte qui a réalisé, en free lance, la maquette de la Renault. Ce talentueux maquettiste a été connu du grand public grâce aux articles de Jean-Marc Teissedre dans la revue Auto Hebdo.

En 1978-1979, au moment de la sortie de ces miniatures, Solido sort d’une période difficile. Il y a eu un flottement après le départ de la famille De Vazeilles. Les fabricants industriels de miniatures cherchent leur voie. Dinky Toys n’est plus là. Solido se recentre un temps sur les voitures de tourisme, avec succès en créant trois gammes distinctes, au dégré de finition différent.

Nous avons cette semaine une BMW 2002 turbo qui est une belle réussite et un bon choix.

La Citroën GS, également au programme appartient encore à la série 100. C’est un vrai chef-d’oeuvre :  traitement de calandre, des portières avec leurs montants, des feux arrière, ligne générale. Mais le domaine des autos de compétition, qui a pourtant fait les beaux jours de la marque est touché : le catalogue de 1977 comporte des modèles à la conception bâclée.

Sur des bases existantes, Solido se contente de décliner des variantes. Les nombreuses erreurs commises sur ces modèles sont inadmissibles.

On s’interroge sur la démarche consistant à reproduire la seule Ferrari Daytona, qui possède un spoiler avant bien particulier, sans le réaliser, alors qu’il aurait été possible de choisir  d’autres versions  correspondant au moule. (Lire le blog Mission accomplie ICI)

Mêmes remarques pour la Ford Escort rallye Gr.2, la Ferrari 512M Piper, l’Alpine Renault A442 de 1975 de ce catalogue. Heureusement, la nouvelle direction lit les critiques sévères de la presse spécialisée et  écoute les conseils avisés des gens de la BAM (Boutique Auto Moto).

Ces derniers orientent Solido vers le maquettiste Alain Wibratte qui, occasionnellement, va aider à la réalisation des prototypes, comme pour cette Renault A442B. L’équipe de la BAM va mettre en relation Solido avec la société italienne Cartograph, considérée à l’époque comme « le leader » dans la réalisation des planches de décoration. Cartograph travaillait jusqu’ici principalement pour les artisans du monde du kit « haut de gamme ».

Je me souviens de la surprise que j’ai eue en voyant ce nom sur les planches de décoration des nouvelles Solido de course. Nous sommes au début d’un bouleversement dans le monde de la collection des voitures de course. Jusqu’ici, les amateurs se contentaient le plus souvent d’une variante de chaque modèle. C’est le fabricant Champion, le premier qui a pensé à décliner ses modèles en six décorations, toutes existantes (Lola T70,Porsche 917K, Ferrari 512) dans le but d’amortir l’outillage en multipliant les versions à peu de frais.

Cette idée va être reprise quelques années plus tard par la BAM, qui va se servir des bases Solido comme support à ses déclinaisons. On comprend que les dirigeants de la boutique parisienne souhaitaient se baser sur des reproductions de qualité.

L’Alpine A442B aura droit à sa planche de décalques commandée à Cartograph et vendue par la BAM, afin que l’amateur puisse décliner les quatre modèles au départ de l’édition 1978, dont celle aux couleurs Calberson. Cette boutique, fort active, recommencera l’opération de nombreuses fois (Fiat 131, Porsche 934, Porsche 935, BMW M1, Ferrari 365GTB4 Daytona) n’hésitant pas à commander à Solido des séries limitées, peintes dans les couleurs spécifiques des versions choisies.

Le but avoué de Jean-Marc Teissedre était de démocratiser le modélisme automobile. Il savait bien que le montage des kits n’est pas à la portée de tous, financièrement et techniquement. C’est le début d’un nouveau type de collection : les gens  commencent à multiplier les décorations différentes sur un même modèle : les Lancia Stratos ou les Fiat 131 pour les uns, les BMW M1 ou les Porsche 934 pour les autres.

Ces modèles sont simples à assembler et les décalques d’une très bonne qualité. Ces créations sont à la portée de tous. Je me souviens qu’au début, les amateurs de déclinaisons de voitures de course, étaient considérés comme des originaux par les « anciens » qui ne comprenaient pas l’intérêt d’avoir 20 Lancia Stratos. Aujourd’hui, la pratique est courante, il suffit de voir un fabricant comme Spark, qui décline en plusieurs dizaines de versions un modèle à succès (Porsche 935, 956, …). Les Solido en vente cette semaine sont là pour me rappeler cette période si riche.

En parcourant les photos des modèles programmés, je constate que certains m’attirent   plus que d’autres. J’ai eu des affinités immédiates avec certains modèles et ce dès le début de ma collection. Je peux citer la série des cabriolets Solido. Il faut avouer qu’elle laisse peu de gens indifférents, surtout la Peugeot 403 cabriolet.

Parfois, c’est un simple détail qui attire l’oeil du collectionneur. Prenons le cas du break Peugeot 404 commerciale de chez Dinky Toys avec ses pneus blancs. Outre la rareté du modèle ainsi paré, je trouve l’ensemble harmonieux.

S’il faut parler d’affinité, je n’en ai pas eu immédiatement avec la série plastique de Politoys. Mais le temps a fait son affaire. D’autres élements d’appréciation sont apparus. En tant que professionnel, je me suis aperçu que ces miniatures revenaient rarement sur le marché. Peu de gens les ont considérées à leur sortie et elles sont rarement présentes dans les collections d’époque. J’ai donc décidé de les garder et de les collectionner en raison de cette rareté. Ce n’est certes pas leur valeur qui m’a convaincu, car il y a 40 ans elles n’en avaient pas. Et voilà justement l’autre élément qui ma motivé : collectionner les modèles qui n’intéressent pas les autres permet de les obtenir meilleur marché !  Cette semaine, cette Alfa Romeo dauphine avec sa boîte vous tend les bras. Sur ce modèle, j’ai même décidé de décliner les couleurs. La grise n’est pas fréquente.

Vincent Espinasse