Rouge !

En voyant la grille de présentation des modèles programmés cette semaine et la prédominance des autos de couleur rouge, tout fabriquant confondu, je me suis souvenu d’une anecdote.

Jean-Michel Roulet en parle dans son livre consacré aux Dinky Toys France. M. Badaroux, qui travailla presque 20 ans au bureau d’étude de Dinky Toys, me l’a également rapportée au hasard d’une conversation. Je vous la livre. Claude Thibivilliers devait, de manière hebdomadaire, présenter les nouveaux projets à M. Hennequin, directeur de la société. Ce dernier validait très souvent la couleur rouge pour ces nouveaux modèles.

Un jour, lors de la présentation d’un nouveau modèle, lassé par la monotonie des choix de son patron, il osa dupliquer dans la même couleur rouge tous les exemplaires présentés. Je n’ai jamais su comment avait fini l’histoire !

De son côté, M. Hennequin avait des éléments que n’avait pas Claude Thibivilliers. J’ai eu la chance de rencontrer son fils. Ce dernier m’avait expliqué qu’avant de succéder à M. Chanu, son père dirigeait l’entreprise de fabrication de peinture qui fournissait entre autre Dinky Toys…C’est M. Chanu qui lui avait proposé de déposer sa candidature à sa succession. Il connaissait donc bien ce domaine, et savait mieux que quiconque les couleurs les plus demandées.

La couleur rouge est ainsi omniprésente dans tous les catalogues de jouets entre 1960 et 1970. Cette semaine nous avons six Corgi Toys.

Cinq sont finies en rouge, avec des nuances allant du cerise métallisé (Mercedes 600) au rouge bordeaux (MG « B » ).

 

La Mercedes 220se est elle finie en rose champagne métallisé, couleur des plus originales à défaut d’être des plus crédibles ! JRD a aussi utilisé cette teinte sur sa Mercedes 220se. Il existe une version bordeaux de cette Corgi Toys, bien plus classique, comme chez JRD ! 

 

La version pompier de la Chevrolet Impala reçoit une finition bicolore, rouge et blanc du plus bel effet. C’est une version tardive, la première, avec carrosserie monobloc était rouge uni.

 

Enfin, la robe rouge du cabriolet  Austin Healey lui confère un côté sportif, qui lui va bien.

Politoys est le premier fabricant de jouets a avoir généralisé la peinture métallisée sur sa gamme de miniatures au début des années soixante.

Cette finition leur conférait un côté exclusif, comme sur les vrais voitures d’ailleurs. Le problème à résoudre fut celui de  réduire au maximun l’effet pailleté.

Je me souviens des kits montés dans les années quatre-vingt : l’application de certaines bombes de couleur, réalisées au départ pour restaurer les rayures et autres dommages sur les voitures, produisait un effet visuel peu esthétique sur une miniature au 1/43.

On se souvient du supplément de prix conséquent auquel l’acheteur consentait lors de la commande d’une voiture pour une peinture métallisée. Dinky Toys Liverpool va à son son tour adopter ce type de finition, mais un peu plus tard. Liverpool était souvent à la traîne et avait toujours du mal à se remettre en question.

De manière un peu excessive, même les véhicules de pompier vont recevoir une luxueuse robe rouge métallisée. On se souvient des Ford transit, Range Rover et autres Berliet grande échelle pompier. En voyant cette déferlante de peinture métallisée sur toute la gamme, on peut imaginer que cela avait un impact sur les ventes, ou alors que Liverpool avait négocié des stocks importants qu’il fallait désormais utiliser.

Cette semaine, une belle Rolls Royce Silver Shadow est au programme, finie en rouge métallisé.

Cette miniature est assez difficile à se procurer. Curieusement, elle n’a pas été importée chez nous au contraire des autres Rolls Royce.

Ce type de véhicule luxueux avait pourtant du succès auprès des jeunes acheteurs.

La Jaguar Type E, également en vente, est beaucoup plus tardive dans cette finition rouge rubis métallisé. Elle est difficile à se procurer. En vitrine elle clôt la belle série de Type E, déclinée en de nombreuses couleurs. Ce modèle semble avoir, lui aussi, rencontré du succès jusqu’à la fin de sa production . 

Mebetoys, firme milanaise apparue en 1966, concurrent direct de Politoys, va logiquement utiliser aussi la peinture métallisée. Les nuances de teinte seront souvent plus foncées que celles de Politoys.

J’aurais tendance à dire que ces firmes ont surexploité ces teintes métallisées, parfois au détriment de la crédibilité du modèle. Mais il ne faut pas oublier que nous sommes dans le domaine du jouet et en cela elles reflètent une époque.

Cette semaine nous avons une Lotus Europa rouge métallisé que j’oserais qualifier de peu fréquente. Le rouge métallisé fut moins usité que le bleu métallisé ou le vert métallisé chez Mebetoys. 

 

La Lancia Fulvia HF va connaître un beau succès en rallye à la fin des années soixante, comme la Porsche 911, l’Opel Kadett et la Mini.

Mebetoys qui avait les quatre modèles à son catalogue va en profiter pour décliner une série « rallye Monte-Carlo 1968 ».

A l’époque, les autos participant à ce type de compétition ressemblaient à celles que l’on croisait sur les routes, et pour un fabricant de jouets l’ajout de plaque de rallye, de phares supplémentaires et d’une décoration « rallye » suffisait.

En cela on peut faire le rapprochement avec Corgi Toys qui a aussi beaucoup exploité cette classique hivernale.

Mebetoys ira un peu plus loin. Outre un boîtage spécifique, elle va fournir pour ces quatre miniatures une carte d’Europe dépliable, indiquant le fameux parcours de concentration 1968 et ses différents points de départ aux quatre coins de l’Europe. Une fois arrivés à Monte-Carlo dans les temps impartis, les rescapés participaient au parcours final dans les Alpes, parcours fait d’épreuves de régularité et bien sûr d’épreuves spéciales chronométrées.

Mebetoys, comme Corgi Toys, éditera un coffret regroupant les quatre autos. C’est une pièce très rare que j’ai mis longtemps à acquérir.

 

 

 

Cette semaine nous avons la Porsche 911 qui s’est d’ailleurs imposée dans cette épreuve en1968. Ce fut la première victoire de Porsche dans ce rallye. Elle est finie de couleur rouge comme l’originale. La firme de Stuttgart avait adopté à cette période cette couleur, pour les autos qu’elle engageait directement. La présence de la boîte et de la fameuse carte dépliable est un vrai plus.

 

Si vous préférez les autos italiennes, nous avons aussi la Lancia Fulvia, dans une livrée tardive, de 1973, aux couleurs des cigarettes Marlboro, finie en rouge métallisé.

Mebetoys gardera longtemps cette auto à son catalogue. Elle connaîtra même une version Alitalia empruntée aux Lancia Startos qui dominèrent le monde du rallye pendant quelques années.

 

Dès la création de l’automobile, le record de vitesse absolue a constitué un challenge pour les  ingénieurs et les mécaniciens, principalement d’origine anglo-saxones, qui voyaient à travers la détention de ce record une forme de suprématie mondiale.

Anglais et Américains ont fait de cet exercice leur chasse gardée. Les autos participant à cette chasse aux records ont vite été transformées en engin n’ayant que peu de lien avec la fonction d’automobile au sens premier du terme, c’est à dire un véhicule servant à voyager, à se déplacer d’un point à un autre.

En France, au début des années trente, des constructeurs vont aborder les records sous un autre angle. Ils vont s’attaquer à des records de distance et de moyenne horaire sur des anneaux de vitesse. Ces records seront classés en fonction de la cylindrée des moteurs. Les autos seront dérivées de modèles de série.

Ces records connaîtront un grand engouement auprès du public et assureront des retombées commerciales importantes pour les constructeurs. Citroën l’a bien compris qui reprendra à son compte l’aventure des Citroën Rosalie que le fabricant d’huile Yacco avaient engagées dès 1932, pour vanter la qualité de ses produits.

Les collectionneurs de miniatures peuvent mesurer l’impact de ces records par le grand nombre de miniatures que les fabricants de jouets ont offert à leurs clients, prouvant l’intérêt de ces derniers pour ce type d’auto carénée.

 

 

 

Dinky Toys France utilisera principalement cette teinte après guerre pour ses autos de course. A la reprise, après la guerre, ce sont les autos italiennes qui dominent la compétition.

En l’absence des autos allemandes, l’Alfa Romeo 158 conçue avant guerre peut désormais montrer son potentiel. Elle remportera les deux premiers championnats du monde de formule1. Maserati sortira sa 4clt en 1948. En 1947 apparaîtra en compétition, à Piacenza, une marque qui fait encore parler d’elle aujourd’hui, Ferrari.

Bref, la couleur rouge attribuée aux concurrents italiens est la couleur qui domine les compétitions à cette période.

Cela explique le choix de Bobigny pour sa Dalahaye et son Hotchkiss empruntée à Liverpool. Nous avons aussi cette dernière à la vente, dans sa version anglaise d’après guerre, finie dans une robe argent, nettement moins fréquente. Ces autos constituent un formidable thème de collection.

 

Vincent Espinasse