… il y a trente ans, un Monsieur qui habitait à Versailles, m’avait contacté, pour vendre une collection de Dinky Toys que son père avait constituée au milieu des années cinquante.

Ce dernier voyageait souvent en Grande-Bretagne pour son activité professionnelle, fait peu fréquent à  l’époque, et avait ramené un grand nombre de modèles de Londres.

Son fils avait ainsi réuni une collection de près de 150 modèles, exclusivement composée de Dinky Toys français et anglais. La référence de l’époque. Ces modèles faisaient sa fierté auprès de ses camarades qui ignoraient d’ailleurs jusqu’à l’existence d’une branche anglaise de Dinky Toys…comme beaucoup de gens en France à l’époque. Ce n’est qu’au début des années soixante que Liverpool commença à exporter en France quelques références…mais aussi à emprunter des moules à Bobigny pour étoffer son catalogue à moindre frais.

Enfant, il n’avait jamais joué avec et il les avaient toutes gardées précautionneusement dans leur boîte.

Comme beaucoup de jeunes gens de son époque, il aimait l’automobile, et il avait constitué son « salon » de l’auto, en essayant d’avoir la plus grande diversité possible. Pour lui, c’est la représentation à l’échelle réduite d’une automobile qui primait, le côté maquette, alors que ces objets étaient avant tout des jouets.

Je me souviens surtout de ma déception en ouvrant la boîte de l’Austin Devon bicolore portant la pastille verte et rose sur les languettes.

Il m’avait raconté qu’il avait été choqué par ces couleurs très éloignées de la réalité et comment le jeudi suivant, il avait acheté un pot de peinture pour maquette de couleur noire et repeint méticuleusement l’auto afin qu’elle ne dénote pas sur ses étagères. Je ne me rappelle pas lui avoir demandé ce qu’il avait alors pensé de mai 68 et des couleurs chamarées de cette époque hippie.

J’ai pensé à cela en voyant le feu d’artifice des couleurs proposées cette semaine. Je me suis aussi rappelé que durant mes quarante ans d’activité professionnelle, j’ai été au contact de ces deux « écoles » de la collection.

Collectionne t’on le jouet ou la  reproduction de la voiture ? Ou les deux ?

Cette semaine nous avons ainsi la fameuse Austin Devon bicolore. Au delà de son esthétique, qui peut choquer, il me semble intéressant de la repositionner dans l’histoire. Elle arrive en fin de production. Les premières couleurs, pas vraiment dérangeantes, étaient distribuées en boîte de six pièces.

 

 

On note bien la présence, au départ, d’une lumineuse couleur rouge. Cette déclinaison est d’ailleurs rare. Les autres teintes comme le vert tilleul, le vert jade et le vert sauge étaient susceptibles de plaire à notre amateur versaillais.

D’ailleurs je me souviens qu’il avait  tous les autres modèles de la série 40, dans des teintes conventionnelles ou peu dérangeantes.

L’usine Solido se situait non loin de Versailles. Force est de constater, qu’à l’image de notre ami versaillais, la firme d’Oulins avait des idées conservatrices concernant le choix des harmonies de couleurs pour ses modèles.

Avouons qu’elle n’a jamais pris de risque en la matière. Elle tentera cependant des combinaisons originales avec ses modèles de compétition. Il faut dire qu’à l’époque, les années 50-60, les grilles de départ des courses automobiles étaient colorées.

Le choix des harmonies de couleurs des modèles de la série 100 est donc de bon goût et rarement dérangeant.

Le programme de la semaine nous le confirme. Si vous voulez des couleurs vives, improbables, il vous faut alors puiser dans les filiales étrangères de la marque : Dalia, Solido Brosol…

Mais cette semaine tous nos modèles sont d’origine française.

On peut avec cet autre modèle au programme, la Ferrari 250GT 2+2  décliner un certain nombre de variantes de rouge, allant du rouge vermillon au brun métallisé.

Il va falloir de la patience et de la persévérance pour rassembler toutes les nuances. Cette Ferrari vaut vraiment le coup.

La Citroën Ami 6 break de la semaine est verte. Le choix est excellent. Deux nuances très importantes existent.

 

 

Celle proposée est la moins fréquente, elle est plus claire que la première sortie des chaines de Solido. Sur ce type de produit vous pouvez aussi décliner les couleurs d’intérieur. Cela modifie vraiment l’aspect de la miniature.

A travers les programmations de la semaine j’ai trouvé intéressant de comparer le traitement des productions allemandes de Märklin et italiennes de Mercury.

Mon intérêt pour les deux firmes m’a fait trouver de nombreux liens entre elles alors qu’à prime abord tout semble les opposer.

Au départ ce sont deux firmes venant de deux pays aux cultures différentes. Après la seconde guerre mondiale et suite à cet épisode douloureux, Mercury a eu besoin de diversifier son activité économique (sous-traitance de pièces détachées en zamak à la Fiat).

Un des choix envisagé de la diversification par la direction fut la création d’une unité dédiée à la fabrique de jouets.

 

Mercury tracteur et système d’agrafes de fixation série 20 Collection AutoJaune

 

Plusieurs modèles, du début de la production, l’Auto Union Type D et la Mercedes W125 sont librement inspirés des modèles produits avant-guerre par la firme de Göppingen. Le tracteur censé tirer les avions chez Märklin apparaît en Italie en déclinaison tracteur agricole, très légèrement modifié. Le système de fixation, avec agrafes, des autos Mercury démontables  (« 20 » berline et « 21 » cabriolet ainsi que les camions aux carrosseries interchangeables)  semblent emprunter aux modèles Märklin d’avant-guerre. Quand on sait que quelques années plus tard Märklin importera les Mercury en Allemagne, on comprend que les histoires se sont croisées et ce dès la création de Mercury.

J’ignore cependant comment. Est-ce par l’intermédiaire de Franz Carl Weber en Suisse, à qui Mercury doit, grâce au comte Giansanti Coluzzi, sa mise sur orbite commercial de son activité jouet ? Les protagonistes auraient pu se rencontrer lors de salon sous la férule du comte.

Une chose est certaine, ces deux firmes ont travaillé ensemble. Pourtant à voir le traitement très différent de leurs productions et des harmonies de couleur, cela interroge.

Observez les beaux Volkswagen Kombi de Märklin au programme. Les couleurs semblent sorties du catalogue Volkswagen. C’est « germanique » cela respire la rigueur. On est loin de l’exubérance des couleurs Mercury de la Lincoln Continental (jaune d’or) ou de la Studebaker Golden Hawk  programmées dans la semaine !

Pas de fausse note chez Märklin bien que parfois la qualité de peinture soit loin d’être parfaite. Les Mercury sont globalement bien mieux finies que les Märklin. La firme de Göppingen a produit des modèles à la gravure exceptionnelle. Les modèles turinois ne sont pas mal non plus dans ce domaine. En voyant les autres couleurs des modèles Mercury à la vente, je me dis que parfois la firme turinoise est restée sage. La superbe Volkswagen 1200 bleu, l’Alfa Romeo Giulia Ti rouge ou la Fiat 1500 cabriolet blanche sont de bons exemples de modèles qui peuvent convenir à un large public.

Une mention spéciale sur la splendide harmonie de couleur de la Fiat 1800, bleu ciel et pavillon noir. J’aime ce modèle qui est loin d’être le plus facile à trouver en Mercury. Cette couleur sort des sentiers battus.

Vincent Espinasse