Sur les circuits

…d’une collection dont le vendeur m’avait vanté la qualité.

Peut-être pour encourager ma venue. Il l’avait commencée au milieu des années cinquante et l’avait poursuivie jusque dans les années 80.

Pas de variantes de couleurs à l’époque, les amateurs cherchaient principalement à retracer l’histoire de l’automobile, son présent et son futur, ce qu’on admirait dans les salons et qui annonçait ce que l’on verrait dix ou vingt ans plus tard dans les rues.

Justement, pour exposer sa collection, notre homme avait pris comme source d’inspiration le salon de l’auto. Les miniatures étaient donc regroupées par marque, bien alignées, comme dans les allées du Grand Palais et plus tard dans celles de la Porte de Versailles.

Dans cette logique d’exposition statique, il avait supprimé tous les personnages de ses miniatures. Ceux là même qui donnent une vie au jouet.

Je le revois tenter de m’expliquer qu’au salon, les autos étaient statiques et qu’il aurait été incohérent de laisser un personnage au volant. Mais en enlevant le personnage qui donne vie au modèle, il avait juste modifié la fonction  première de l’objet, celle du jouet.

Tous les cabriolets de chez Solido, mais aussi de Dinky Toys avaient perdu leurs figurines ! Il n’avait pas pensé à les garder ! A quoi bon, m’avait il répondu !

En quarante ans de métier j’ai  rencontré des cas similaires, mais généralement les collectionneurs avaient pensé à garder les figurines. Il suffisait de quelques minutes pour retrouver la boîte d’allumettes grand format ou celle des pastilles Valda où elles étaient stockées.

 

J’ai repensé à cela en voyant la belle Ford Thunderbird 1963 de chez Dinky Toys France et la Willys jeep lance missiles.

Nous avons un autre modèle fort intrigant, une Renault 8 Gordini avec un conducteur casqué, ce qui est normal,  et un co-pilote, ce qui l’est moins.

Il s’agit donc d’une version « rallye » avec navigateur.

Ce modèle nécessite quelques explications. Il a été assemblé en dehors de l’usine, après sa fermeture, avec des pièces d’origine. Quelques personnes ont récupéré un certain nombre de pièces détachées et des carrosseries déjà peintes et même finies au pochoir et décorées. Ils les ont assemblées et bouterollées avec une machine d’origine qu’ils ont aussi récupéré sur place.

Cette Renault 8 est une déclinaison originale, réaliste, qui mérite que l’on s’y intéresse. L’important est que l’amateur sache ce qu’il achète et à quel prix. 

Mais avouez que la présence des deux co-équipiers donne de l’allure au modèle et nous change de la version circuit « coupe Renault 8 Gordini ».

Restons sur les circuits, mais passons à des modèles plus puissants.

Nous avons cette semaine des Ferrari 275P de chez Mercury.

La présence du pilote casqué semble indispensable pour crédibiliser auprès d’un enfant une auto de course synonyme de puissance et de vitesse.

Le pilote, avec sa combinaison rouge, ivoire ou bleu pâle participe au charme du modèle. Mercury a eu l’idée de décliner cette auto en plusieurs couleurs, c’est astucieux. A cette époque Enzo Ferrari revendait rapidement ses bolides à des structures privées (Filipinetti) ou à ses importateurs (Francorchamps en Belgique, NART Amérique du Nord côte Est…).

En vitrine c’est un plaisir de les réunir.

Pour Dinky Toys aussi, une auto de course rimait forcement avec un pilote casqué. Sur la belle Mercedes W25 référence 23 C en vente cette semaine, il est moulé avec la carrosserie et peint de couleur caramel. 

C’est une réussite. Les proportions sont bonnes même si cette couleur de combinaison correspond à celle que l’on rencontrait sur les circuits britanniques de cette époque.

Chez Mercedes, les pilotes avaient des combinaison blanches…que Märklin a parfaitement rendues.

 

Si Meccano a créé la branche Dinky Toys consacrée aux accessoires, dont les automobiles, chargés de faire vivre leurs réseaux de train distribués sous le nom Hornby, les firmes Jo Hill Co et Taylor and Barret ont, elles, fabriqué des miniatures automobiles pour accompagner les figurines dont la production constituait leur principale activité.

Cela explique la qualité d’exécution des personnages qui accompagnent leurs modèles automobiles.

Cette semaine nous avons un splendide attelage de chez Taylor and Barret, composé d’une mule et d’une charrette, de forme typiquement britannique, chargée de fruits et légumes.

Dès mes premiers voyages Outre-Manche je suis tombé sous le charme de ces produits. Je les collectionne depuis très longtemps.

Nous avons malheureusement peu de fabrications équivalentes en France.

En Grande-Bretagne elles sont si nombreuses que plusieurs beaux ouvrages les recensant ont vu le jour.

Appréciez la finesse de reproduction des fruits et légumes dans les deux panières.

Finesse, c’est aussi le vocable qui convient à la réalisation des quatre pompiers embarqués dans le camion Rolls Royce également en vente de chez Taylor and Barret.

Ils sont majestueux. Le chauffeur a les mains sur le volant alors que les trois autres sont assis les bras le long du corps.

Ce camion, moins spectaculaire que celui équipé d’une grande échelle repliable ou celui muni d’une échelle amovible montée sur roues est néanmoins beaucoup plus rare.

Ce modèle, « économique »  vendu moins cher, a rencontré moins de succès que les deux autres bien plus spectaculaires et plus conformes à  l’image qu’on se fait du camion de pompier.

Restons en Grande-Bretagne avec une autre façon, bien particulière, de représenter des personnages et de donner vie à un modèle.

Ces trois modèles sont des Brimtoys Pocketoys.

Leur particularité est de posséder une caisse en tôle lithographiée. Cela permet à un fabricant de jouets de laisser aller son imagination sur un même module, en changeant simplement les dessins sur les parois. Les deux Bedford type « S »,avec leur cabine en plastique, reçoivent une caisse de forme parallépipède en tôle, avec un ouvrant laissant découvrir en fonction de la lithographie utilisée un marchand de glace ou une épicerie ambulante.

C’est désuet mais charmant. L’idée sera reprise chez Sésame en France.

Le troisième modèle proposé se situe juste avant dans la chronologie de fabrication, il est lui entièrement en tôle pliée et lithographiée.

Grâce à cette technique, Brimtoys a pu réutiliser la presse dédiée à la fabrication de son camion de déménagement, avec sa capucine, et décliner un camion brasseur promotionnel pour une marque d’eau minérale « Presta ». 

Grâce à une utilisation maitrisée du trompe l’oeil on oublie qu’au départ c’est un camion de déménagement. C’est bien là toute la magie du jouet !

A cette époque, impossible pour une petite firme comme Birk d’injecter des jouets en zamac.

La technique est trop onéreuse. Elle va donc adapter sa fabrication aux matériaux qu’elle maitrise : la tôle pour le châssis et le plomb pour les carrosseries.

C’est là que réside à mes yeux l’intérêt de cette marque qui avec de petits moyens va proposer une gamme encore plus variée que celle de la firme qui l’a inspirée, et de belle qualité d’éxécution.

Elle va décliner sa Graham en coupé, limousine, fourgonnette, dépanneuse, plateau, benne, balayeuse, voiture de pompier, et même autocar !

L’exemplaire proposé, un fourgon de police avec ses barreaux gravés sur les parois est sublime. Il est d’origine et en superbe état de conservation. Nombreux sont les amateurs américains qui en ont acquis durant les quarante dernières années et qui les ont restaurés…

Vincent Espinasse